Je remercie Jean Sintes de nous avoir envoyé ces infos sur la coopérative à Budapest avec qui lui et Marie-Line sont en contact.
A noter qu’ils ont créé une société coopérative européenne depuis peu: Moba SCE
Budapest : Emménagement dans une nouvelle coopérative d’habitat malgré les obstacles
12 Mar 2019 par Zsuzsi Pósfai
Zsuzsi Pósfai est membre du Rákóczi Collective (RC) à Budapest, en Hongrie. Les membres de ce collectif travaillent depuis environ sept ans pour établir la première coopérative d’habitat locatif en Hongrie.
Fin janvier, nous avons emménagé dans la première coopérative d’habitat créée par des membres du Rákóczi Collective. Cette coopérative devrait ouvrir la voie à d’autres logements similaires à l’avenir.
Rákóczi Collective – Alternatives to individual homeownership
Cette coopérative est le résultat de nombreuses années d’efforts et d’organisation pour arriver à cette maison paisible installée dans le quartier de Zugló à Budapest. Nous sommes maintenant sept à y habiter, avec bien plus d’espace et de meilleures conditions de vie que nous avions avant. La situation en matière de logement est de plus en plus difficile à Budapest, avec une hausse sensible des prix des logements et des loyers, dont certains ont même doublé au cours de ces cinq dernières années. La location est en outre risquée car le marché de la location est sous-règlementé et les locataires ne sont pas protégés contre les propriétaires. Vous pouvez être expulsé dans des délais très brefs ou votre loyer peut augmenter à tout moment.
La propriété collective de notre nouvelle maison implique un partage collectif de toutes les décisions et responsabilités. Il n’y a pas de propriétaire, et ce logement peut être stable et sûr à long terme, ce qui est un soulagement pour les personnes qui déménagent pratiquement chaque année, passant d’une location à une autre. Les règles que nous avons établies impliquent que tous les résidents doivent accorder du temps au logement et contribuer financièrement à la tenue de celui-ci.
Nous avons toutefois rencontré de nombreuses difficultés dans le cadre de ce projet, notamment parce que ce type de logement n’existait pas en Hongrie. La coopérative d’habitat est pour ainsi dire inconnue ici, et les municipalités, les institutions financières ou les parties tierces estiment souvent que c’est dès lors trop risqué.
Premièrement, il a été très difficile de trouver une maison qui correspondait à nos souhaits : une maison où 10 à 15 personnes pouvaient vivre ensemble, incluant de grands espaces communs et idéalement un jardin, en étant assez proche de la ville.
Nous avons négocié avec plusieurs municipalités, mais les accords proposés ne répondaient pas à nos attentes, et nous avons dès lors décidé de nous tourner vers le marché du logement. Les logements visités étaient souvent abandonnés et beaucoup trop couteux à rénover, ou étaient tout simplement trop chers et il nous était impossible de trouver un capital de départ suffisant.
En fin de compte, nous avons du faire un compromis sur la taille de la maison et nous avons commencé à regarder des plus petites maisons pour sept personnes, en utilisant dès lors un plus grand pourcentage d’argent que nous avions réuni entre nous, et en devant trouver dès lors moins de ressources externes. C’est comme cela que nous avons trouvé cette maison en mars 2018, et nous avons rapidement décidé que nous essaierions de l’acheter.
L’autre grand obstacle était l’absence de mécanisme financier disponible pour les coopératives d’habitat en Hongrie. Par consequent, nous avons essayé d’obtenir des emprunts immobiliers individuels, mais ceux-ci ont été refusés en raison du niveau trop faible de nos revenus, et ces emprunts ne semblaient pas suffisamment stables. L’idée de plusieurs personnes dans une relation non-familiale avait également tendance à faire fuir les organismes de crédit. Nous avons été choqués lorsque nous avons appris que notre emprunt était refusé et que tout notre argent avait déjà servi à payer les deux premiers versements pour la maison. Nous avions à peu près un mois pour réunir la deuxième moitié de l’argent pour la maison, à savoir environ 100.000 euros.
Notre idée était d’emprunter de l’argent à des personnes autour de nous. En seulement deux semaines, nous avions collecté la somme nécessaire. Cela était très important pour nous car cela nous montrait que tous nos efforts au cours de ces dernières années n’étaient pas vains, et que nous étions suffisamment crédibles pour que des personnes investissent leurs économies dans notre projet.
Ensuite vint la rénovation. Notre plan était de nous occuper de la plupart des travaux, dans la mesure où il nous restait très peu d’argent. Certains de nos membres n’avaient pas d’autre endroit où vivre lorsque nous avons reçu les clés de la maison, et tous les autres étaient en fin de bail. Nous n’avions dès lors pratiquement pas d’argent et très peu de temps. Nous avions prévu six semaines pour terminer les travaux mais nous en avons eu besoin de dix en réalité. Tout le monde était épuisé mais avait acquis de nouvelles compétences.
Une des meilleures expériences de la rénovation était que le travail le plus important (plomberie, électricité, maçonnerie) a été réalisé par des membres de la coopérative Gólya. Ce processus de rénovation est un exemple parfait de façon dont des réseaux partageant des objectifs similaires peuvent travailler ensemble pour obtenir des résultats.
Tous les obstacles que nous avons rencontrés sont similaires à ceux rencontrés par toutes les premières coopératives d’habitat en Europe de l’Est, raison pour laquelle nous collaborons dans le cadre de MOBA. En plus de construire un réseau de soutien, nous essayons de nous entraider pour surmonter tous les obstacles.
Notre prochain défi est d’enregistrer légalement notre coopérative, ce qui implique que nous convenions de ses principes, avant de l’enregistrer auprès du tribunal. Nous devons également trouver l’argent pour rembourser les emprunts que nous avons contractés auprès de nos bailleurs directs. Nous développons une ressource financière systématique et fiable que d’autres groupes pourront utiliser dans le futur. Cela est essentiel pour créer un modèle vraiment accessible pour une large frange de la société hongroise, qui rencontre des difficultés pour payer les logements.
Entre-temps, nous tentons également de créer un foyer et une communauté, et non un simple projet pilote, à partir de cette maison qui a un énorme potentiel.